L’inventeur du Web, Tim Berners-Lee, a publié son plan pour sauver le Web, avertissant qu’une “dystopie numérique” est à venir si les grandes entreprises technologiques et les gouvernements ne changent pas leurs habitudes.
Berners-Lee a dévoilé la première partie du Contrat pour le Web – neuf principes à destination des gouvernements, des entreprises technologiques et des particuliers.
Le contrat stipule, par exemple, que les gouvernements doivent veiller à ce que tout le monde puisse se connecter à Internet et à ce que tout le monde y ait accès en permanence, tandis que les entreprises de technologie sont invitées à rendre Internet abordable et accessible à tous, et à respecter la vie privée et les données personnelles des consommateurs.
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Une fakenews atteint 1 500 personnes six fois plus vite qu’une histoire vraie
Au cours de l’année écoulée, cinq groupes – y compris des entreprises de technologie, le gouvernement et d’autres groupes et particuliers intéressés – ont travaillé à la rédaction de 76 articles contenant les détails qui sous-tendent chacun des neuf principes. La prochaine étape consiste à encourager les entreprises de technologie, les gouvernements et les autres organisations à accepter de suivre ces règles.
M. Berners-Lee soutient que si son invention s’est avérée être l’un des outils les plus puissants dont nous disposons pour améliorer des vies, elle est aussi devenue une source de nouvelles menaces, notamment l’ingérence électorale, le harcèlement en ligne, les atteintes à la vie privée et la diffusion de la désinformation.
La Web Foundation souligne qu’aux États-Unis, un jeune de 12 à 17 ans sur trois a été victime d’intimidation en ligne, qu’une fakenews atteint 1 500 personnes six fois plus vite, en moyenne, qu’une histoire vraie, et que les escroqueries en ligne coûtent aux utilisateurs dans 20 pays environ 172 milliards $ en 2017. La fracture numérique est un autre problème : alors que 83 % des européens sont aujourd’hui en ligne, seuls 28 % des Africains le sont – et 46 % du monde ne l’est toujours pas.
Une “vision du Web que nous voulons”
“Le pouvoir du Web pour transformer la vie des gens, enrichir la société et réduire les inégalités est l’une des opportunités déterminantes de notre époque. Mais si nous n’agissons pas maintenant – et si nous n’agissons pas ensemble – pour éviter que ceux qui veulent exploiter, diviser et saper le Web n’en fassent un mauvais usage, nous risquons de gaspiller ce potentiel” explique Tim Berners-Lee.
Le Contrat pour le Web est une première en ce sens que c’est la première fois que tous ces groupes se sont réunis pour créer une “vision du Web que nous voulons”, a déclaré Emily Sharpe, directrice des politiques de The Web Foundation à ZDNet.
Prochaine étape : l’application de la loi
La prochaine étape consiste à commencer à appliquer certains de ces principes. Tim Berners-Lee s’attend à ce que les entreprises et les gouvernements qui approuvent le contrat en respectent les principes et montrent les progrès réalisés à cet égard, qu’ils les publient et qu’ils en rendent compte.
Par exemple, le projet demande aux entreprises de technologie de proposer un panneau de contrôle central qui permettra aux consommateurs de voir quelles données les concernent. “Dans un an, nous voulons voir qu’un plus grand nombre d’entreprises auront mis en place ces panneaux de contrôle” a dit Mme Sharpe.
Le projet est soutenu par Google, Facebook, Reddit et DuckDuckGo, ainsi que par des groupes comme l’Electronic Frontier Foundation, Public Knowledge et Ranking Digital Rights. Les gouvernements de l’Allemagne, de la France et du Ghana ont également signé le document.
“Nous ne nous faisons aucune illusion que cela se produira du jour au lendemain”
Mais il reste encore beaucoup à faire. Et certaines de ces entreprises qui se sont inscrites sont celles qui sont le plus régulièrement blâmées pour le mauvais état du web. “Le fait qu’elles se soient inscrites et qu’elles aient mis leur nom en regard de cela est significatif. Dans un an, le monde pourra se demander si vous avez réellement fait ce que vous aviez dit que vous feriez” a dit Sharpe.
“Nous ne nous faisons aucune illusion que cela se produira du jour au lendemain, mais nous nous attendons à voir des progrès significatifs d’ici un an ou deux et nous continuerons à faire pression pour les années à venir. C’est une chose à laquelle nous nous engagerons pour les années à venir” a ajouté Mme Sharpe.
Reste que la tendance actuelle n’est pas en faveur du Contrat pour le Web. De nombreuses entreprises de technologie tirent leurs revenus de l’exploitation denos vies numériques pour en vendre les données, tandis que des gouvernements utilisent la désinformation sur le Web pour limiter les débats. C’est une situation que beaucoup pensent être de pire en pire. Mais ce n’est pas une raison pour abandonner, affirme Sharpe.
“Nous sommes à un point de basculement, nous sommes à un moment critique. Il n’est pas trop tard. Il ne doit pas être trop tard – nous devons faire quelque chose à ce sujet” dit-elle.
Source : “ZDNet.com”
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