Tout savoir sur le procès de Donald Trump — 20 Minutes
Le procès en destitution de Donald Trump début véritablement ce mardi.
Mis en accusation pour « abus de pouvoir » et entrave au Congrès, il est jugé par les sénateurs. Sauf coup de théâtre, il devrait être acquitté, compte tenu de la majorité républicaine au Sénat.
Des surprises ne sont toutefois pas exclues, surtout si des nouveaux témoins comme John Bolton sont convoqués.
De notre correspondant aux Etats-Unis,
C’est l’ultime étape de la bataille de l’impeachment. Mis en accusation par la Chambre pour « abus de pouvoir » et « entrave au Congrès », Donald Trump fait face à la menace d’une destitution lors de son procès devant le Sénat. Après des points de procédure jeudi dernier, les débats commencent véritablement ce mardi. Grâce à la majorité républicaine, le président américain est presque assuré d’être acquitté. Mais son procès, qui devrait durer entre deux et quatre semaines, pourrait réserver des surprises, surtout si des témoins clés, comme l’ex-conseiller de la Maison Blanche John Bolton, étaient entendus.
De quoi est accusé Donald Trump ?
D’avoir sollicité l’aide de l’Ukraine pour enquêter sur Joe Biden et son fils Hunter (qui a travaillé pour la compagnie gazière ukrainienne Burisma quand son père était vice-président) dans l’espoir d’obtenir des informations compromettantes en vue de la présidentielle du 3 novembre. Les démocrates estiment qu’il a fait pression sur Kiev en suspendant une aide militaire américaine. Pour eux, cela rentre dans la catégorie des « crimes et délits majeurs » justifiant une destitution.
Combien de temps va durer le procès ?
Ça dépend. Le leader des républicains, Mitch McConnell, souhaiterait une procédure express qui durerait moins de deux semaines, en jugeant Donald Trump uniquement sur les éléments présentés à la Chambre, sans entendre de nouveaux témoins. Les démocrates, eux, veulent convoquer plusieurs personnalités, notamment l’ex-conseiller à la Sécurité nationale John Bolton et le chef de cabinet de Donald Trump, Mick Mulvaney. Certains républicains pourraient forcer un vote rapide demandant l’acquittement immédiat de Donald Trump, mais Mitch McConnell ne présentera sans doute pas une telle résolution s’il n’a pas les voix nécessaires.
Comment va se dérouler l’audience ?
Mardi, les sénateurs vont voter pour établir certaines règles. Mitch McConnell propose de donner deux jours aux démocrates de la Chambre pour présenter leur dossier (mercredi et jeudi), et deux jours à la défense de Trump pour y répondre (vendredi et samedi), lors de journées marathon de 12 heures allant de 13h à 1h du matin. Ce n’est vraisemblablement que la semaine prochaine qu’un vote tranchera la question des témoins. A l’issue des débats, les 100 sénateurs voteront pour condamner ou acquitter Donald Trump.
Quelle est la différence avec un procès traditionnel ?
L’impeachment est une procédure politique. Donald Trump n’est pas jugé au pénal : il n’est pas accusé d’avoir enfreint la loi américaine, mais d’avoir violé son serment de président (pour avoir fait passer son intérêt personnel avant celui des Etats-Unis, selon les démocrates). Ici, les sénateurs sont à la fois le jury et, pour certains aspects, le juge – ce sont notamment eux qui établissent les règles du procès. Le chef de la Cour suprême John Roberts, qui préside, a un rôle essentiellement protocolaire. Il peut décider quelles preuves sont admissibles mais le Sénat peut passer outre par un vote. En cas d’égalité 50-50, John Roberts pourrait toutefois être amené à jouer les arbitres.
Qui joue le rôle du procureur ?
Les démocrates ont choisi sept « managers de la Chambre », qui plaideront pour tenter de convaincre les sénateurs de la culpabilité de Donald Trump. On retrouve notamment l’ancien procureur Adam Schiff, qui a mené la charge de l’impeachment à la Chambre.
Qui défend Donald Trump ?
La défense du président américain est menée par le conseiller juridique de la Maison Blanche Pat Cipollone et par l’un des avocats personnels de Donald Trump, Jay Sekulow, qu’on avait beaucoup vu face à Robert Mueller. Vendredi, la Maison Blanche a appelé en renfort l’ex-Némésis de Bill Clinton Kenneth Starr (le procureur spécial dans l’affaire Lewinsky), et l’avocat médiatique Alan Dershowitz, qui avait défendu Jeffrey Epstein. Ce week-end, la défense de Trump a dévoilé sa stratégie, assurant que « l’abus de pouvoir » et l « entrave au Congrès » ne correspondant pas à des crimes ou des délits du code pénal, ils ne peuvent pas justifier un impeachment – une thèse rejetée par de nombreux juristes.
Le procès est-il télévisé ?
En partie. Mitch McConnell n’a autorisé qu’une caméra, qui sera parfois éteinte, quand le Sénat décide d’avoir une session fermée, par exemple lors du vote sur les témoins.
John Bolton et d’autres témoins seront-ils entendus ?
Le suspense est total. Il faudra un vote de 51 sénateurs pour convoquer des témoins. Quelques républicains semblent y être favorables, comme Mitt Romney et Susan Collins, mais il en faudra quatre, en plus des 47 démocrates. Donald Trump pourrait tenter de les bloquer en faisant jouer son « privilège exécutif ». Mais selon les experts juridiques, le Sénat devrait pouvoir passer outre car on n’est pas dans un procès au pénal. Après avoir tergiversé, l’ancien conseiller à la Sécurité nationale John Bolton a indiqué qu’il accepterait de témoigner s’il est convoqué.
Trump va-t-il témoigner ?
Il y a quelques mois, il avait assuré qu’il était prêt à le faire. Il avait tenu le même discours face à Robert Mueller avant de changer d’avis. Selon toute logique, ses avocats devraient lui expliquer que c’est une très mauvaise idée.
Y aura-t-il des témoignages en direct ?
Sans doute pas. Si le Sénat convoque des témoins, ils seront, a priori, interrogés « behind closed door », comme lors du procès de Bill Clinton en 1999. Des vidéos de leur témoignage pourraient cependant être diffusées au Sénat par la suite. Globalement, il ne faut pas s’attendre à une audience théâtrale. Les sénateurs doivent garder le silence, sous peine d’emprisonnement. S’ils ont une question à poser aux managers ou à la défense de Donald Trump, ils doivent le faire par écrit, et c’est le chef de la Cour suprême qui la lit.
Donald Trump peut-il être destitué ?
Ce scénario nucléaire n’a presque aucune chance de se produire. La plupart des républicains, comme Mitch McConnell ou Lindsay Graham, ont déjà indiqué qu’ils étaient convaincus de l’innocence de Donald Trump. Avec 47 démocrates sur 100, il faudrait que 20 sénateurs républicains abandonnent leur président pour atteindre la majorité des deux-tiers nécessaire pour sa destitution. A moins que de nouveaux éléments n’émergent, Donald Trump devrait donc être acquitté… Et faire face au verdict des urnes le 3 novembre.
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