Alors que Bloomberg annonçait il y a une semaine que la France lancerait en novembre un système d’identification par reconnaissance faciale sur les services public en ligne, Cédric O a profité d’une interview accordée au Figaro pour clarifier l’arrivée d’Alicem (pour “Authentification en ligne certifiée sur mobile”). « C’est une proposition qui a été faite, mais cette date me semble prématurée » prévient le secrétaire d’Etat au numérique. « Nous avons saisi le Conseil national du numérique et les députées Paula Forteza et Christine Hennion ont débuté un travail pour le compte de l’Assemblée nationale sur le sujet de l’identité numérique. Nous n’ouvrirons pas le test plus largement avant que nous ayons eu leurs premiers retours. »
Consentement obligatoire
En clair, il s’agit d’un projet et ce système biométrique ne sera pas lancé dans l’immédiat, et d’ailleurs, son utilisation sera facultative. « Il y a beaucoup de fantasmes. Alicem est aujourd’hui en test sur quelques milliers de personnes. En matière d’identité numérique, nous ne prévoyons à ce jour aucun mécanisme qui obligerait à passer par la reconnaissance faciale. Si l’utilisateur de l’application souhaite s’en servir, il doit explicitement donner son consentement au préalable. »
A propos de l’utilisation de ses données privées, il ajoute : « Lors de l’inscription à l’application, le logiciel utilise la caméra pour vérifier que l’utilisateur du téléphone portable est bien le détenteur du titre d’identité. Les prises de vue ne quittent pas le téléphone et ne sont pas conservées. Enfin, la reconnaissance faciale n’est plus jamais utilisée lors de l’utilisation de l’application. »
L’outil Alicem (pour “Authentification en ligne certifiée sur mobile”), créé par le ministère de l’Intérieur et l’Agence Nationale des Titres Sécurisés (ANTS), doit permettre via le recours à la technologie de reconnaissance faciale, d’accéder aux services publics sur la plateforme “France Connect” avec un niveau de sécurité “élevé” dans leurs transactions électroniques au regard de la législation européenne dédiée.
Il devrait surtout permettre à la France de se placer en tête de file au niveau mondial sur la question de la sécurisation des échanges en ligne et de l’identification des citoyens sur la toile.
Si la création d’un compte Alicem, qui ne sera disponible que sur les seuls smartphones Android, n’est pas obligatoire, elle reste fortement conseillée par les autorités, qui y voient un moyen de prouver son identité sur Internet de manière sécurisée face aux tentatives d’usurpation d’identité sur Internet. Celles-ci ont par ailleurs indiqué qu’Alicem, qui doit lui “permettre d’assurer sa mission régalienne de certification de l’identité dans un monde digital complémentaire du ‘monde physique'”, constitue “la préfiguration d’un service plus large d’identité numérique en cours de conception”.
Un lancement critiqué par la Cnil et les associations
Reste que cet “avant-goût” n’est justement pas au goût de tout le monde. Si les autorités assurent que “les données ne feront l’objet d’aucun traitement et ne seront pas transmises à des tiers” et que l’outil laissera à ses utilisateurs un “haut niveau de maîtrise” de leurs données, uniquement enregistrées sur le téléphone portable de l’utilisateur et partagées uniquement avec les services choisis par ce dernier, il suscite pour l’heure autant de méfiance que d’intérêt.
Notamment du côté de la Cnil, qui a regretté au printemps dernier que l’exécutif ne propose aucun moyen alternatif que la biométrie pour permettre à tout un chacun de se doter d’une identité numérique. Pour l’Autorité, l’utilisation de cet outil ne répond en outre pas aux standards du RGPD, qui suppose un consentement libre et éclairé pour l’utilisation de dispositifs comme celui de la reconnaissance faciale.
Les associations ne sont pas en reste. A l’image de la Quadrature du Net, qui a déposé en juillet dernier un recours devant le Conseil d’État pour demander l’annulation du décret autorisant la création d’Alicem. (Eureka Presse)
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