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Pourquoi l’Iran est soupçonné d’avoir accidentellement abattu un avion ukrainien –

L’appareil a décollé de la piste à 6h12, mercredi. Au départ de l’aéroport Imam-Khomeini de Téhéran, le vol 752 de la compagnie Ukraine International Airlines devait emmener ses 167 passagers et 9 membres d’équipage à Kiev. Six minutes plus tard, le Boeing 737 s’est écrasé non loin de l’aéroport, dans la banlieue sud de la capitale iranienne. Que s’est-il passé pour que cet avion fabriqué il y a trois ans, dûment contrôlé deux jours avec le drame, se crashe de la sorte ? Depuis jeudi, l’hypothèse d’un tir de missile accidentel par l’Iran se précise.

Qui soupçonne l’Iran d’avoir abattu l’avion par erreur ?

En fin d’après-midi jeudi, plusieurs médias américains révèlent, sur la foi de sources anonymes, que les renseignements américains en sont désormais convaincus : un missile iranien est à l’origine de la tragédie. Celui-ci est intervenu dans un moment très particulier : quelques heures plus tôt, l’Iran déclenchait sa riposte après l’assassinat le 3 janvier, par les Etats-Unis, du plus puissant général des Gardiens de la révolution, Qassem Soleimani. Plusieurs salves de missiles balistiques s’abattaient contre deux bases aériennes abritant des membres de l’US Army en Irak. Les forces armées iraniennes étaient donc certainement toujours en alerte lorsque le vol Ukraine International Airlines a décollé.

Le renseignement américain auraient détecté l’activation d’un radar et le tir de deux missiles sol-air grâce à des satellites de surveillance. Il s’agirait d’un missile de type Tor-M1, de fabrication russe. La thèse a pris un peu plus de consistance avec les déclarations du Premier ministre canadien, Justin Trudeau. «Nous avons des informations de sources multiples, notamment de nos alliés et de nos propres services [indiquant] que l’avion a été abattu par un missile sol-air iranien», a-t-il dit lors d’une conférence de presse jeudi soir, ajoutant que le geste «n’était peut-être pas intentionnel».

Vendredi matin, le président Volodymyr Zelensky, décidé à découvrir «toute la vérité», appelait toujours à la prudence, dans l’attente de données confirmant la thèse du tir de missile. «Avec le président Volodymyr Zelensky, [nous] avons rencontré des représentants américains et reçu des données importantes qui seront traitées par nos spécialistes», a écrit sur Twitter le chef de la diplomatie ukrainienne, Vadym Prystaïko, sans donner plus de précisions. Une entrevue est par ailleurs programmée entre le président ukrainien et le secrétaire d’Etat américain, Mike Pompeo, plus tard dans l’après-midi.

Est-ce crédible ?

Au-delà des déclarations et confidences anonymes, plusieurs éléments tangibles et vérifiées permettent, a minima, de remettre en cause la thèse de l’accident inexpliqué jusqu’ici défendue par les autorités iraniennes. Au moins deux vidéos ont été tournées juste avant le crash et diffusées sur les réseaux sociaux. Le New York Times et Bellingcat, le média spécialisé dans l’enquête à partir de sources ouvertes, les ont disséquées.

La première «semble montrer» le moment de l’impact, écrit prudemment le quotidien américain, qui a pu s’entretenir avec l’auteur de cette courte séquence. L’homme, qui fumait une cigarette à l’extérieur, a dégainé son téléphone et commencé à filmer après avoir entendu «des sortes de coups de feu». En comparant la vidéo avec des images satellitaires, fournies par la société Maxar Technologies, le NYT a pu établir l’endroit où il se trouvait. La direction de sa caméra est cohérente avec l’itinéraire de l’avion. L’écart entre la détonation aperçue et le moment où l’on entend le son permet confirme cette localisation.

La vidéo montre enfin que «l’objet volant» change de cap après la détonation et prend la direction du lieu du crash. Une autre vidéo, également tournée par un passant, montre l’avion en flamme voler quelques secondes avant de s’écraser, provoquant une immense explosion.

Que répond l’Iran ?

Téhéran continue de réfuter officiellement la thèse du missile, mais le discours est en train de s’infléchir, tant cette position devient intenable, d’heure en heure. Jeudi, l’Iran refusait encore de livrer les boîtes noires de l’appareil, mais a assuré vendredi qu’il ferait appel aux experts ukrainiens, français, canadiens et russes s’il ne parvenait pas à les déchiffrer. L’extraction des enregistrements audio et des données de vol pourrait prendre un ou deux mois, ont prévu les autorités, sous une pression internationale croissante.

La Commission européenne les a formellement appelées à mener une enquête «indépendante et crédible […] suivant les règles de l’Organisation de l’aviation civile internationale». Le ministre français des Affaires étrangères a souligné qu’il «[fallait] une clarté totale sur ce qu’il s’est passé» et a proposé que la France «contribue à l’expertise nécessaire». Pierre Alonso , Veronika Dorman

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