Ce lundi devant le théâtre Bobino, dans le XIVe arrondissement, plusieurs dizaines de manifestants scandaient des discours anti-Griveaux. A l’intérieur, presque autant de ministres et secrétaires d’Etat étaient réunis pour le meeting du candidat à la mairie de Paris. Christophe Castaner, Gabriel Attal, Didier Guillaume, Julien Denormandie, Marlène Schiappa… Le gouvernement presque au complet pour incarner le «rassemblement» autour du chef de file officiel de la macronie. Et convaincre les récalcitrants. «Je voudrais en appeler aux marcheurs et marcheuses qui ne sont pas ici ce soir, qui ont voulu voir ailleurs comment ça se passait, je veux leur dire ce soir qu’ils peuvent revenir», a déclaré la secrétaire d’Etat Marlène Schiappa, candidate en deuxième position sur la liste du XIVe. Un «appel aux marcheurs tentés par l’aventure Villani», annonçait l’équipe de campagne de Griveaux, comme on parle d’un moment d’égarement avant un retour au foyer.
Dimanche, le mathématicien a répété qu’il maintenait sa candidature et acté ses divergences avec la majorité après une entrevue avec Emmanuel Macron. Le chef de l’Etat lui a demandé de se «rapprocher de Griveaux» alors que les soutiens de ce dernier désespéraient de l’absence de réaction face à l’insolente démarche de Villani. Celui-ci devrait être exclu de LREM ce mercredi. «Ça clarifie», souffle un membre de d’équipe de campagne du candidat officiel qui aurait appelé son concurrent, sans réponse. Une main tendue pour la forme, alors que dans le même temps, le camp Griveaux insiste sur «l’affront fait au président de la République, devant l’Elysée». «Une défiance jamais vue» ou la démonstration du manque de reconnaissance du député élu avec l’étiquette LREM quand l’ex-porte-parole du gouvernement reste fidèle à sa famille politique.
Nouveau souffle
«Cela fait du bien de se retrouver tous ensemble», a déclaré la députée de Paris Olivia Grégoire, qui faisait office de chauffeuse de salle sur une scène remplie de candidats assis en rang devant un slogan «un nouveau souffle pour Paris». Souffle dont la campagne de Griveaux a bien besoin. Selon un sondage publié par le Figaro, il plafonne à 16 %, derrière Anne Hidalgo et Rachida Dati, à 25 et 20 %. «Un sondage à l’échelle de Paris, dans une ville où on vote par arrondissement, ne veut rien dire», a relativisé la marcheuse. Juste avant d’expliquer, sans craindre la contradiction, que «la première chose qui nous frappe, c’est la maire sortante qui est 10 % en dessous de son score de 2014». Une comparaison qui fait abstraction du fait que la bipolarisation gauche-droite, incarnée par le duel NKM-Hidalgo, a laissé place à un éclatement du paysage politique, avec cinq candidatures au-dessus de 10 %.
«Nous devons construire un large rassemblement car j’ai bien compris qu’Hidalgo souhaite l’éparpillement», a d’ailleurs déclaré Pierre-Yves Bournazel. Le député ex-UMP rallié à LREM a décidé de soutenir Benjamin Griveaux après avoir tenté l’aventure en solo. «J’ai rejoint Benjamin car il est rassembleur», a-t-il poursuivi.
«Bons mots»
Le candidat, conscient que la candidature de Villani n’explique pas à elle seule sa difficulté à émerger, a fait son introspection sur scène. «Il va briser l’armure, promettait son équipe de campagne avant le discours. Il a une image arrogante alors que ce n’est pas le cas.» Un problème d’incarnation ressenti jusque dans son propre camp. «Celles et ceux qui ont rejoint l’aventure initiée par Villani […] ont sans doute aimé chez lui ce qu’ils ne retrouvaient pas chez moi : davantage de naturel, une part de fantaisie et de sensibilité, a déclaré le candidat. Derrière mon assurance et mes bons mots, auxquels je ne sais pas toujours résister [un euphémisme pour qualifier les insultes proférées contre ses adversaires et révélées par le Point cet été, ndlr], se cachent aussi mes angoisses et mes échecs, mes épreuves, mes drames familiaux. Tout cela forge un caractère et manifestement une carapace. […] Il me reste sept semaines pour vous dire ma part de vérité, celle que vous n’avez pas pu voir jusqu’alors car je n’ai pas su la partager avec vous.»
Des caresses pour les villanistes, et des coups pour Hidalgo. Le candidat qui entend représenter les classes moyennes et incarner le pragmatisme, renvoyant la maire sortante à des idéologies supposées déconnectées du réel, a dépeint un Paris en «état d’urgence social, environnemental et démocratique». Sans pour autant faire de nouvelles annonces sur le fond. Alors que son projet de relocalisation de la gare de l’Est, vendue comme une mesure forte censée relancer la campagne, a fait un bide ce week-end, le candidat s’est contenté de rappeler les propositions déjà formulées. «Des choses sont passées sous le radar, on va revenir là-dessus», expliquait son équipe de campagne, alors que certains dans son camp avouent constater que son projet «n’imprime pas». Il a notamment insisté sur la sécurité et l’écologie. L’illustration du «et en même temps» macroniste. Charlotte Belaich
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