Après un an de réduction progressive du support de Windows 10 Mobile, l’expérience de Microsoft sur le système d’exploitation mobile maison atteindra officiellement sa fin de vie en décembre 2019.
Les tout derniers appareils Microsoft et OEM sous Windows 10 Mobile ont été lancés en février 2016. Ce fut l’ultime sursaut d’une série de produits qui n’ont jamais atteint la masse critique. Beaucoup ont attribué cet échec à l’acquisition ratée de 7,2 milliards de dollars de Nokia par Microsoft. Ce fut aussi le chant du cygne du PDG sortant de la société, Steve Ballmer.
Il s’agissait d’une gamme de produits dont Satya Nadella, le nouveau PDG, a hérité, sans l’adopter. Il est devenu évident, au fil du temps, que Windows 10 Mobile n’a jamais bénéficié de l’attention qu’il aurait du mériter au sein de Microsoft pour en faire un succès. L’incapacité de l’entreprise à communiquer à ses partenaires une stratégie de développement logiciel convaincante et cohérente pour Windows 10 Mobile (ainsi que pour les applications natives Windows 10) s’est traduite par un gâchis absolu dont l’entreprise ne s’est jamais remise.
Renaissance ou échec définitif ?
Microsoft est depuis passé à autre chose. Au lieu de vendre ses propres appareils mobiles, Microsoft est devenu indépendant de sa plate-forme en écrivant des dizaines d’excellentes applications pour Android et iOS, telles que Outlook, OneDrive et Office 365. De plus, elle s’est engagée dans des partenariats avec des fournisseurs comme Samsung, qui pré-installe les applications de Microsoft.
Microsoft a continué d’investir dans la recherche et le développement de nouveaux matériels Windows, tels que la gamme d’appareils mobiles et de systèmes de bureau Surface, ainsi que la gamme Surface Hub de tableaux blancs interactifs et de casques à réalité mixte HoloLens.
Mais les espoirs d’un nouveau smartphone de marque Microsoft, dont nombre de fans de Windows 10 Mobile s’étaient résignés à utiliser des appareils Android et des iPhones, étaient réduits à néant. On se souviendra peut être du 2 octobre comme du jour où Microsoft a triomphé de l’adversité et de ses échecs antérieurs. Où bien du jour où nous avons découvert que Microsoft était incapable de tirer des leçons de ses erreurs passées.
Concurrence avec Samsung, LG, Lenovo, Huawei, ZTE, OnePlus et Pixel
Microsoft a dévoilé le Surface Duo, un appareil mobile à double écran tout à fait inhabituel qui transcende les catégories smartphone, phablet et tablette. L’appareil dispose de deux écrans de 5,6 pouces qui se transforment en un périphérique de 8,3 pouces, ce qui permet à ses utilisateurs de le déplier (comme un livre). Et de l’utiliser avec une seule configuration d’écran (comme un phablet), ou avec les deux écrans en même temps (comme un tablet). Ils peuvent également l’utiliser avec un clavier pour former un minuscule dispositif semblable à un PC.
Les deux écrans ne sont pas l’aspect le plus surprenant du produit, qui sortira fin 2020. Il y a déjà eu des smartphones à double écran. L’aspect spectaculaire, c’est qu’il ne fonctionne pas sous Windows mais sur Android de Google.
Il ne se contente pas de faire tourner un Android Vanilla en utilisant l’Android Open Source Project (AOSP), ou même un fork spécialisé comme celle qu’Amazon utilise sur ses tablettes Fire OS. Le Surface Duo sera un appareil OEM Android sous licence Android complète, avec Google Play et Google Play.
Avec le Surface Duo, Microsoft sera en concurrence avec Samsung, LG, Lenovo et d’autres entreprises chinoises comme Huawei, ZTE et OnePlus – soit un groupe très bien établi de fournisseurs de périphériques qui ont déjà conquis des parts de marché importantes. Sans parler de Google lui-même, avec le Pixel.
Naturellement, en raison de ses échecs antérieurs avec Windows 10 Mobile (et de son matériel Lumia), il y aura beaucoup d’appréhension à traiter avec Microsoft côté partenaires. Et côté client aussi. De nombreux fans de Microsoft à qui j’ai parlé ont été refroidis par Windows Phone et Windows 10 Mobile. Et ils sont réticents à donner une seconde chance à l’entreprise. Microsoft doit faire du Surface Duo un énorme succès, sinon, il devra faire ses valises et rentrer chez lui.
Les réponses en suspens
Il y a beaucoup de choses que nous ne savons pas encore sur le Surface Duo. Les spécifications du matériel, pour commencer. Quel puces utilisera-t-il ? Le Qualcomm Snapdragon (probablement le 865), ou une puce personnalisée de la série SQ comme le Surface Pro X ? Aura-t-il la 5G intégrée ? Quelle technologie d’écran utilisera-t-il ? Quel type, et combien de caméras, et quels types de capacités d’apprentissage machine son système d’imagerie aura-t-il ? Mémoire et stockage ? Quelle version d’Android utilisera-t-il — 10 ou 11 ? Qu’est-ce que ça va coûter ? 1000 €, 2000 € ? Personne ne sait.
Une année, c’est très long dans l’industrie de la technologie. Surtout qu’il pourrait y avoir un nombre illimité de retards imprévisibles – voire une annulation. Toutes ces questions mises à part, parlons des préoccupations plus larges que j’ai en tant que client potentiel du Surface Duo et qui, j’en suis sûr, ne sont pas uniques.
Comment Microsoft pourrait il faire du Surface Duo un énorme succès ? Eh bien, à mon avis, il doit devenir un OEM (fabricant d’équipement d’origine (FEO), en anglais Original Equipment Manufacturer) Android modèle. Cela signifie qu’il doit faire un meilleur travail pour la communauté Android que celui des fournisseurs établis, tels que Samsung.
Microsoft peut-il faire mieux que les autres ?
S’il s’agit, en fait, du même Android toutes les autres licences OEM — probablement avec le “skin” de Microsoft et le Launcher — à quelle fréquence Microsoft prévoit-il de le mettre à jour et de le patcher ? Avec Windows 10 Mobile, Microsoft avait au moins le contrôle de son système d’exploitation. Mais avec Android, son fournisseur de technologie d’OS en amont est Google.
En outre, nous savons que Microsoft ne va pas seulement installer un Android générique avec le Play Store, comme Google le fait avec son Pixel. S’il concède une licence à Google Play Services et au support de Google pour devenir un OEM Android, il va apporter des modifications importantes pour personnaliser l’expérience et l’intégrer à ses produits, tout comme Samsung le fait avec ses téléphones.
Comme nous l’avons expérimenté avec tous les principaux OEM Android, la mise à jour de leurs produits avec des correctifs et des mises à jour majeures de version est problématique. Dans la plupart des cas, vous avez de la chance si vous obtenez les correctifs de sécurité et les corrections de bugs implémentés dans les semaines suivant leur publication par Google. Si vous obtenez une mise à jour majeure de la version Android au cours de la durée de vie de ces appareils, c’est à peu près tout.
C’est pas très dur en fait
Si vous voulez des mises à jour annuelles du système d’exploitation sur une période de support de cinq ans, alors procurez-vous un iPhone. Si vous souhaitez avoir des mises à jour annuelles pendant quelques années, alors prenez un Google Pixel.
Il n’y a aucune raison pour que ces OEM Android ne puissent pas mettre à jour le logiciel sur ces appareils en temps opportun. Mais ils ne sont pas motivés parce qu’ils veulent vous vendre de nouvelles choses à la place.
Franchement, je pense qu’ils n’ont pas tous la discipline de développement logiciel nécessaire pour maintenir quelque chose d’aussi compliqué qu’un système d’exploitation mobile sur plusieurs lignes de produits. Ce ne sont pas des entreprises matures à cet égard.
Proposer une alternative au Pixel pour les professionnels
Microsoft, pour sa part, a plus de 40 ans d’expérience dans la maintenance des environnements de développement logiciel et des builds d’OS, et il a ajouté à sa réputation un excellent support pour les logiciels open-source ces dernières années. Seul Apple peut se vanter d’une telle longévité. Android n’est pas le produit de Microsoft, mais je crois que Microsoft peut réussir à supporter la pile logicielle du Surface Duo là où d’autres ont échoué avec leurs appareils.
J’aimerais avoir une alternative sur Android au Pixel avec une mise à jour fiable du logiciel et une roadmap de maintenance. Ce pourrait être le Surface Duo et d’autres produits smartphone Surface s’ils se concrétisent.
Franchement, au niveau de prix auquel je m’attends, le Duo a intérêt à avoir un cycle de maintenance d’au moins quatre ans, surtout si l’on considère qu’en tant qu’OS, Android lui-même peut être remplacé par Fuchsia dans les cinq ans. Mais personne ne sait exactement comment Microsoft entend gérer cette transition.
Le plein de fonctionnalités Microsoft pour les professionnels ?
Dans un appareil mobile comme le Surface Duo, il existe des outils sur mesure que j’aimerais voir ajouté par Microsoft. Les contrôles de sécurité de confidentialité pour Android par exemple. L’entreprise a également Intune pour la gestion des appareils mobiles qu’elle pourrait déployer gratuitement pour tous les utilisateurs de Surface Duo, et, bien sûr, une version premium pour les entreprises.
Qu’en est-il de l’authentification des comptes Azure Active Directory / Microsoft pour les appareils Duo ? Les entreprises adoreraient avoir une connexion unique prête à l’emploi pour toutes les applications Microsoft préchargées sur leurs téléphones Android.
Je veux aussi des audits et des logs sur Android. Je veux savoir précisément quand Android envoie des données à Google, et quelles données sont transférées. Microsoft, s’il vous plaît, donnez-moi un journal des événements et un gestionnaire de services de type Windows Server pour Android, et la possibilité de désactiver et de verrouiller les services, de manière sélective, à un niveau granulaire. Je ne crois pas que les contrôles de confidentialité et de sécurité intégrés de Google me protègent à l’heure actuelle, peu importe comment je les configure.
Le foisonnement de Microsoft est il une bonne chose ?
Il y a d’autres préoccupations auxquelles Microsoft doit s’attaquer à un moment donné, et cela devrait se produire le plus tôt possible. Avec l’adoption d’Android pour ses smartphones et la conteneurisation des applications Win32 et UWP sous Windows sur x86 et ARM pour ses tablettes Surface Neo et Surface Pro X, quel message cela envoie-t-il à son écosystème de développeurs ? Un message brouillé à minima.
Actuellement, Windows 10 X/WCOS pour x86 et Windows on ARM semblent avoir suffisamment de différences pour ne pas être des cibles de développement identiques, du moins à ce stade de leur développement. L’implémentation d’Android sur Surface ajoute un autre environnement que les développeurs Windows traditionnels de Microsoft et les développeurs Android doivent prendre en charge.
De plus, étant donné que Microsoft n’a aucun contrôle sur le processus d’admission des applications sur le Google Play Store, qu’est-ce que cela signifie pour les développeurs qui veulent profiter des capacités sur l’appareil et des extensions qui seront spécifiquement dédiées aux Surface sur Android ?
Un partenariat avec Amazon ?
C’est pourquoi je pense qu’il est maintenant plus important que jamais pour Microsoft de lancer son app store Android. Parce qu’il a besoin d’une maison pour ses partenaires de développement, qui développent des applications pour les entreprises qui ne sont pas dans la compétence de base de Google.
Pourrait-il le faire tout seul ? Amazon est un partenaire naturel pour cette activité, et je m’attends à ce que le partenariat Google dans lequel Microsoft s’est engagé pour lancer le Duo ne soit pas susceptible de perdurer à long terme.
Beaucoup d’entre nous aimeraient désactiver complètement les Services Google Play en raison d’un manque de confiance envers l’entreprise. Que faire si je ne veux que des applications Microsoft et de ses partenaires, des comptes Microsoft et Office 365 ?
Microsoft, s’il vous plaît, donnez nous un appareil robuste et fonctionnel sous Android que les entreprises (et le grand public) puissent utiliser en toute sécurité, et avec confiance. C’est précisément ainsi que vous regagnerez la fidélité (et le business) des clients professionnels à la recherche d’appareils mobiles.
Article “Microsoft Surface Duo: Android failure is not an option” traduit et adapté par ZDNet.fr
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