Un second constat est le développement dans la sphère informatique de technologies à forte valeur ajoutée, comme que l’IA, la science des données ou la sécurité. Autant de nouveaux métiers qui arrivent avec leur propre R&D, méthodes et systèmes opérationnels. On pourrait en dire autant pour les technologies de l’Internet des objets, les drones ou les robots, qui mixent du logiciel avec de nouveaux équipements non manufacturés par les fournisseurs habituels de la DSI quand elle n’a pas déjà dans son périmètre des usines de production..
Il va y avoir une évolution forte des métiers et l’émergence de multiples nouveaux métiers qui n’existent pas aujourd’hui. On a beaucoup parlé ces 5 dernières années du “dataScientist”, une évolution des statisticiens qui hier étaient côté métier et qui ont basculé dans un environnement d’outils et de puissance informatique à la demande. Mais cela va se passer avec chacune de ces technologies de rupture qui vont modifier durablement les processus de l’entreprise. C’est donc une opportunité de déplacer des barrières, souvent figées par une organisation industrielle historique de l’informatique.
On va par exemple assister à de nouveaux postes dans la cybersécurité et la gestion des données. Ces deux compétences vont en effet devoir être présentes partout dans l’entreprise, en misant sur le maillon humain et non pas que sur la technologie. Ces nouveaux postes seront, en amont et en aval, au fur et à mesure que la sécurité de l’information et la maîtrise des données, deviendront un enjeu de leadership aussi fort que la sécurité industrielle tout court. Certaines entreprises auront leurs équipes permanentes de tests de pénétration, comme on a actuellement un contrôle de gestion avec des équipes dédiées pour ce qui relève de la comptabilité.
Le modèle de la “Digital workplace”
Avec des difficultés quotidiennes de transport, les grèves de décembre ont permis de tester la résilience des DSI parisiennes pour manager leurs équipes à distance. La question se pose maintenant de faire du télétravail, qui a bondit ces dernières semaines, un mode d’organisation pour gérer un SI qui est de moins en moins localisé. Pourquoi continuer à s’organiser comme avec un mainframe quand le SI stratégique est sur le smartphone des clients ou dans les entrepôts intelligents ?
La proximité avec les métiers est souvent l’argument que l’on entend pour justifier le rapprochement de la DSI au siège. Un argument qui pourrait aussi être utilisé pour répartir les équipes dans les directions métiers partout là où elles sont et favoriser la mixité des compétences. Cela va demander des approches nouvelles et peut-être de nouveaux rôles pour gérer ces équipes “à distance” comparativement à un modèle hyper-centralisé.
Le développement des équipes agiles a déjà enclenché ce type d’organisation et réorganisé les métiers entre products owner, scrum master, développeurs, devops manager. Les scrums masters peuvent suivre plusieurs projets en même temps, et sur plusieurs lieux.
Pourquoi ne pas généraliser ce modèle au niveau des équipes de support et de tout ce qui est applicatif vu leur convergence en plateformes 24/7 ? L’enjeu, est la capacité à réduire les temps de trajet mais également de réinventer les approches pour attirer les jeunes talents autour d’une filière SI de plus en plus stratégique qui n’a pas toujours une bonne image dans les écoles quand ce n’est pas dans l’entreprise.
D’ailleurs pourquoi s’arrêter à la DSI quand l’entreprise demande le déploiement d’une “Digital workplace” qui regroupe de façon cohérente les outils de communication, de collaboration, d’accés aux applications et de gestion des connaissances, pour tous leurs collaborateurs. Tous les métiers de l’entreprise, avec une priorité sur les métiers supports, cherchent à gagner en efficacité et en réactivité et à favoriser le travail collaboratif.
Pour supporter ces nouvelles organisations les informaticiens vont déplacer leur objectif d’un poste de travail livré et testé en chambre, à un poste de travail opérationnel (et vérifié) pour chaque utilisateur. Les rôles d’empathie et de support vont être en amélioration continue permanente.
Savoir lâcher du lest
Une tendance des outils de développement d’applications est au “low code”, que ce soit de la BI avancée, des plateformes automatisées de conception d’applications et demain des algorithmes en ligne d’intelligence artificielle. Ces outils vont changer les lignes dans l’organisation du développement de mini-applications plus personnalisées et plus agiles.
Or on a déjà vu que l’impact d’une nouvelle répartition des rôles entre utilisateurs et informaticiens, pouvait être contreproductif, comme avec le BYOD et le “Shadow IT” ou même le SaaS. Pourtant, savoir ne pas gérer tous les projets avec le même “rouleau compresseur” des grands projets est une opportunité pour dégager du temps qui sera nécessaire pour développer de nouvelles compétences. Simplifier les méthodes, en basculant une partie de la charge sur les utilisateurs, est une piste à explorer avec des ateliers de conception de plus en plus automatisés.
Dans ce contexte, les informaticiens de demain vont plus avoir un rôle de facilitateur et d’organisateur que de réalisateur. GreenSI parle d’un nouveau modèle opérationnel qui s’inspirera moins de l’industralisation de l’informatique et plus de la décentralisation et de la responsabilisation des utilisateurs. Une nouvelle posture, de nouvelles compétences et un savoir être qui va également demander un apprentissage.
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