Plusieurs articles, ces deux dernières semaines, mettent en avant le DSI comme le pilote la transformation digitale, que ce soit dans l’entreprise (Le rôle de la DSI dans l’entreprise de demain – Silicon, Les DSI, grands orchestrateurs de la transformation numérique – Les Echos) ou dans les collectivités locales (Le DSI est devenu un Directeur du numérique, un acteur incontournable de la Smart City).
Une position que beaucoup de directions générales appelleraient de leurs vœux puisque la maîtrise de la technologie est un facteur essentiel pour le succès des investissements dans le digital, même si l’accompagnement aux changements induits par la transformation, ou les opportunités qu’elle amène, sont complémentaires.
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GreenSI pense aussi que les DSI ont un rôle clef à jouer dans la transformation digitale. Mais, pour GreenSI, si ils ne changent rien il y a peu de chance qu’ils deviennent par magie les hommes de la situation. D’ailleurs la première chose à changer serait peut-être que la moitié d”entre eux soient les femmes de la situation. Ce serait un message fort pour s’attaquer au problème de diversité qui fait que la profession se prive de 50% des talents et des idées, puisque les jeunes filles rejoignent peu le numérique et gravissent encore moins ses échelons.
Cette question du rôle de la DSI dans la transformation digitale n’est pas nouveau. Il a certainement été brouillé ces dernières années avec l’émergence des CDO – Chief Digital Officers – mais au final, une entreprise n’abordera pas le digital à l’échelle sans sa DSI. Pour cela, cette DSI devra au préalable en adopter les fondamentaux que sont l’agilité et la maîtrise du développement, la technologie des plateformes et l’obsession pour l’expérience client.
2020 sera l’année de la maturité DevOps, pour IT Social, ou ne le sera pas si les équipes en charge des infrastructures continuent d’appliquer des méthodes d’exploitation d’un autre temps sur les nouvelles infrastructures dans le cloud, du container jusqu’au serverless. La DSI doit changer ses méthodes. Son “operating model”, s’il n’a pas été revu récemment, est obsolète dans un monde digital et surtout dans les relations de la DSI avec son écosystème, que ce soit les métiers, ses fournisseurs ou les clients de l’entreprise en interaction avec son SI ou ses objets connectés.
En 2015, de l’autre côté de l’Atlantique, la revue d’Harvard publiait l’étude “Driving Digital Transformation: New Skills for Leaders, New Role for the CIO” qui développait déjà les 7 stratégies du DSI pour piloter la transformation digitale (par analogie avec le best seller “Les 7 habitudes des gens efficaces”) :
Être le leader de confiance
Accompagner les responsables métiers
Favoriser les talents
Être le guide vers qui l’on se tourne
Parler le langage de vos clients
Indiquer les voies du possible
Recruter des experts externes
On constate que, les “soft skills” nécessaires étaient mis en avant par rapport à la technologie ou au “hard skills” de la gouvernance, mécanique, longuement négociée, et souvent inadaptée aux situations nouvelles.
Presque cinq ans plus tard, le constat fait par les différents articles est toujours sur le côté RH de la transformation, avec en 2019 des DSI qui ont réussi (où que l’on a laissé réussir) qui amènent leur propre retour d’expérience.
L’étude sur l’avenir de la profession, publiée ce début novembre par Topics et Fabernovel, montre des DSI optimistes qui, même si leur avenir peut sembler incertain, sont convaincus d’une évolution professionnelle passionnante. Ils ont un rôle plus transversal (ce qui a toujours été le cas de l’informatique) mais surtout qu’ils sont maintenant reconnus pour cette transversalité. Le point d’achoppement pointé du doigt par les DSI est l’accompagnement RH, car les sujets au cœur de leur transformation sont le recrutement de développeurs, la (re)formation des équipes, la conduite des changements, la rétention des talents,…
Au niveau des “hard skills”, c’est le sacro-saint “operating model” qui doit changer et s’adapter au digital, ce qui va demander un effort important de conduite des changements pour ne pas revenir en arrière à chaque progrès fait. Prenons trois exemples parmi les 11 ou 12 piliers, selon les modèles, qui structurent l’action de la DSI, pour illustrer les changements fondamentaux à opérer pour aller vers des organisations vraiment agiles, de bout en bout et adaptés au digital.
L’agilité s’applique a tous les domaines du modèle et pas uniquement au développement informatique.
La stratégie aussi devient agile, développant une vision moyen terme, mais testant également des idées a court terme avant de leur consacrer des moyens importants. La stratégie n’est plus le mot magique pour prendre une décision, mais un processus collaboratif partagé avec toute l’entreprise pour encourager les équipes à expérimenter, à apprendre, pour consolider les chemins permettant de se rapprocher de la vision et réduire les investissements sur les fausses pistes.
Dans cette transformation digitale c’est le business modèle de l’entreprise qui est en transformation et qui demande aux métiers une approche évolutive de test et d’apprentissage, et au SI de l’accompagner.
L’organisation d’une DSI digitale est centrée sur les produits. Les projets et les infrastructures ne sont que des moyens au service des produits, orientés vers les clients externes de l’entreprise et son écosystème.
Ce nouveau modèle opérationnel est bien sûr aligné avec la culture DevOps, qui dit que ceux qui construisent les systèmes (Dev) travaillent efficacement avec ceux qui font tourner les systèmes (Ops), mais aussi en amont avec ceux qui les vendent aux client et les conçoivent pour cela, les product owner.
C’est la fin de la séparation traditionnelle entre la conception, le build et le run.
L’agilité avec sa démarche itérative, ses principes fondamentaux, devient un mode de fonctionnement apaisé sur l’ensemble de la chaîne, de l’idée stratégique à sa valorisation au quotidien chez les clients. Les métiers de la DSI deviennent alors plus spécialisés (designer, architecte, développeur, product owner, coach agile, …) pour animer la construction de façon rapide, sur chaque maillon de la chaîne, de façon efficace et améliorable dans le temps.
Est-ce la fin des “chefs de projets” génériques et autres “consultants” qui utilisent leur position pour se méler de tout ? Certainement. Chacun travaille en confiance, à son poste, dans un environnement bienveillant.
Quand la donnée, la plateforme ou la technologie prennent le pouvoir, on redécouvre l’évidence de la valeur d’une l’entreprise : investir dans les salariés !
Cela commence par le recrutement de personnes qui n’ont pas connu l’ancien modèle de gouvernance. C’est souvent le meilleur moyen de ne pas en être esclave et pour GreenSI c’est un enjeu supplémentaire pour plus de diversité dans les équipes informatiques. Dans la même logique, si beaucoup de ressources sont externes, changez vos fournisseurs traditionnels pour de nouveaux acteurs nés avec le digital. Enfin, le faible taux de féminisation de la profession est finalement une chance de ne pas avoir préformaté un ensemble de talents qui peuvent maintenant plus facilement amener un regard neuf pour faire évoluer les systèmes.
L’investissement dans les équipes, c’est aussi l’apprentissage de la collaboration, de l’amélioration continue, et d’une certaine façon du droit l’erreur parfois tabou. Les équipes apprennent à s’auto-organiser pour leur propre efficacité de collaboration, pas uniquement pour appliquer des modèles qui ne peuvent intègrent toutes les contraintes pour servir et satisfaire tous les clients dont ils sont responsables. La performance de l’équipe devient la métrique du bon fonctionnement, ce qui est à l’opposé de la culture que l’on peut rencontrer parfois, celle qui recherche les coupables et veut externalisation systématiquement tous les risques.
Une stratégie agile, une organisation centrée sur les produits (et donc les clients) et l’investissement dans les équipes, sont trois des piliers d’un nouveau “operating model” adapté au digital, qui amènera de la valeur à l’entreprise dans la transformation qu’elle a engagé. Un prochain billet traitera des autres piliers. Ceci demande un travail sur les méthodes et les soft skills.
Mais si vous pensiez que le chef de projet blockchain était ce qui vous manquait pour que votre DSI passe au stade supérieur de la transformation digital, alors GreenSI espère que vous avez été convaincu par les soft skills 😉
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