La 5G a beau être présentée comme une nouvelle technologie de télécommunications mobile, il ne s’agit ni d’une technologie particulièrement nouvelle ni d’une technologie unique. Si l’histoire des télécommunications mobile était comparée à une série TV au long cours, la 5G ne constituerait ni plus, ni moins qu’un reboot de mi-saison, incluant de nouveaux personnages introduits à côté de l’ancien casting ainsi que de nouveaux arcs scénaristiques complétant les intrigues existantes.
Petit rappel des faits. Trois nouvelles générations majeures de technologie mobile ont déjà vu le jour : la 2G a remplacé l’analogique par le numérique, la 3G a commencé à passer à la mise en réseau centrée sur les données et la 4G a achevé cette transition. La 5G devrait désormais se fonder sur trois applications spécifiques : les réseaux mobiles, l’Internet des Objets (IdO) et le contrôle industriel de très haute performance. Reste qu’il est toutefois préférable de considérer pour le moment la 5G comme la continuation de l’évolution à long terme de la 4G (LTE). Cette étape de la 5G est connue sous le nom de NSA (Non Stand Alone) car elle se déroulera en parallèle et en interopérabilité avec les réseaux LTE existants.
Ce qui ne veut pas dire que la 5G ne repose pas sur des innovations significatives. Alors que le processus de normalisation 5G couvre la topologie du réseau central et de la station de base ainsi que d’autres aspects de l’exploitation de réseaux à haute performance, la plupart des facteurs qui affecteront nos premières expériences de la 5G sont affectés par le sous-ensemble de normes appelé New Radio, ou 5G NR. Bien que les travaux n’aient débuté qu’au printemps 2016, ils ont rapidement débouché sur un domaine de recherche jusqu’alors très disparate, produisant un certain nombre de références prénormes quasi-identiques.
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La 5G NR, une première étape dans le déploiement de la 5G
La 5G NR doit son existence à la 3GPP, l’organisme chargé de certifier les normes des technologies de télécommunications mobile, qui avait d’abord été créée pour normaliser la 3G. La première version des normes de la 5G NR a été introduite par la Release 15, la 15ème édition de normes de la 3GPP. Celle-ci a été introduite en 2016, avant d’être produite à toute vitesse pour déboucher sur une version préliminaire publiée en mars 2018 et déclarée suffisamment complète pour que les fabricants puissent commencer la production préliminaire.
Au troisième trimestre de 2018, Ericsson et Huawei ont déclaré avoir déployé plus de 10 000 stations de base dans cette version. Une autre mise à jour standard est apparue en septembre, avec la promesse d’une version pré-standard finale de la version 15 pour décembre 2020, qui devrait fixer pour de bon la normalisation de la 5G NR. Reste que celle-ci ne s’est pas opérée sans difficultés, comme l’a admis la 3GPP, qui a mis en avant une charge de travail écrasante ainsi qu’un manque de communication entre les sous-groupes techniques travaillant du côté du réseau d’accès radio, ceux qui définissent la configuration globale du système et ceux qui sont chargés de la configuration du réseau central pour justifier son retard.
La 5G NR comprend des avancées majeures par rapport à la technologie LTE, chacune présentant des avantages spécifiques. A commencer par l’introduction des spectres d’ondes millimétriques, situés au-delà de la bande des 24 GHz. La première version de la 5G inclue ainsi les fréquences inférieures à 1 GHz jusqu’à 52,6 GHz. Le spectre des hautes fréquences (> 6 GHz) est disponible dans de nombreuses bandes différentes qui varient selon les régions, ainsi que dans de nombreuses bandes qui ne sont pas encore entièrement disponibles en raison de services existants qui doivent être fermés ou déplacés.
Les attributions à bande haute peuvent prendre en charge des débits de données très élevés et une réutilisation intensive des fréquences, ce qui permet d’obtenir un réseau très dense et très performant. Ils ont une portée très limitée pour une puissance de transmission donnée par rapport aux bandes inférieures et à des limites de santé et de sécurité plus strictes, et ils sont plus sensibles aux problèmes environnementaux comme les fortes pluies et la croissance saisonnière des feuilles. Inversement, la très petite longueur d’onde facilite grandement la construction d’antennes de très haute performance de petite taille physique.
Les bandes hautes seront utilisées pour superposer les réseaux LTE existants, fournissant une bande passante beaucoup plus large à la demande afin de réduire la congestion des moyennes et basses bandes LTE (et éventuellement 5G), ainsi que l’accès sans fil fixe (FWA) à large bande à domicile et au bureau.
Les erreurs d’aujourd’hui ne seront plus celles de demain
La conception ultra-plate du réseau est un principe clé de la conception 5G NR, en permettant notamment la réduction de la consommation d’énergie et des interférences. Le LTE repose sur un certain nombre de signaux permanents transmis par les stations de base – des balises qui indiquent quelles cellules sont disponibles, des canaux de référence que les terminaux et les stations de base utilisent pour configurer les liaisons de données, des canaux de commande pour suivre la mobilité, etc. En ce qui concerne le LTE, ces signaux n’occupent pas un pourcentage significatif de l’utilisation globale des canaux, mais la 5G aura un réseau beaucoup plus dense avec plus de cellules, qui auront en moyenne un taux d’utilisation réel assez faible. Les signaux toujours allumés prendront donc un plus grand pourcentage de puissance et interféreront davantage avec les cellules adjacentes, ce qui entraînera une baisse du débit.
Dans la mesure du possible, la 5G réduit ou éteint ces signaux jusqu’à ce qu’ils soient réellement nécessaires. Le signal de référence, par exemple, n’est transmis que lorsque le transfert de données est en cours. Cela signifie que le combiné et la station de base doivent optimiser le signal à la volée, mais l’avantage global pour le débit du réseau est notable.
Le design ultra-plat est également un élément clé de la compatibilité vers l’avant, une exigence spécifique de la 5G NR pour des fins curieusement non spécifiques. La règle de base est de laisser autant de place que possible dans les mises en œuvre pour permettre d’autres applications futures. Dans la pratique, cela signifie qu’il faut réduire au minimum les transmissions non porteuses de données (ce qui réduit le brouillage global et l’utilisation du spectre), avoir un degré élevé de flexibilité et prévoir des voies de reconfiguration à l’avenir, tant dans le matériel que dans les spécifications elles-mêmes.
Cette dernière décision est le fruit de l’expérience du LTE, qui fige un certain nombre de décisions de conception dans la spécification, alors que la 5G permet pour sa part de revenir sur l’architecture pour laisser de la place aux applications futures. De plus, les nouvelles technologies de base telles que la radio logicielle (RRL) ont fait passer une grande partie de l’ingénierie radio du matériel au logiciel, ce qui signifie que les modifications des caractéristiques de fonctionnement qui nécessitaient auparavant une révision complète du matériel peuvent maintenant être remplacées par une mise à jour du logiciel. 5G est la première génération à l’adopter pleinement.
Modulation et cadrage
Comme le LTE, le 5G NR utilise l’ODFM comme système de modulation sous-jacent. L’ODFM (multiplexage par répartition orthogonale en fréquence) combine plusieurs sous-canaux à l’intérieur d’un canal et est reconnu pour sa robustesse contre les interférences et son efficacité dans l’utilisation des fréquences. Il est également très flexible, car différents nombres de sous-porteuses peuvent être ajoutés pour augmenter la capacité d’un canal, ou des nombres réduits pour fournir des options de puissance et de bande passante beaucoup plus basses.
La 5G NR peut choisir l’espacement des sous-porteuses de 15 kHz à 240 kHz, avec un maximum de 3300 sous-porteuses en utilisation simultanée sur un canal. Cependant, les canaux ne peuvent pas dépasser 400 MHz de largeur. La norme est agnostique en fréquence, ce qui signifie que n’importe quelle configuration de sous-porteuse peut être utilisée sur n’importe quelle bande. Dans la pratique, les fréquences moyennes et basses inférieures à 6 GHz ont des caractéristiques de canal et de bruit nettement différentes, ainsi que des largeurs de bande maximales différentes, par rapport aux attributions de bande haute, de sorte que l’espacement des canaux sera de 15 à 60 kHz, tandis que la bande haute sera de 60 à 120 kHz. Il n’y a actuellement aucune attribution de bande 5G entre 6GHz et 24,25GHz, mais la norme permet une configuration ODFM optimale pour correspondre à toute expansion future dans ce spectre.
Tous les appareils compatible avec la 5G NR n’ont pas à supporter toutes les largeurs de bande, un gros point fort par rapport au LTE. La 5G NR prend en effet en charge la bande passante adaptative, permettant ainsi aux dispositifs de passer à une configuration à faible bande passante et à faible consommation d’énergie lorsque cela s’avère nécessaire, et ne s’orientant vers des bandes passantes plus élevées que lorsque cela est nécessaire. Cela crée une opportunité pour les appareils à très faible consommation moyenne qui peuvent encore fournir de hautes performances — les réseaux IoT, par exemple, qui n’ont normalement besoin que de petites quantités de données pour la télémétrie, mais doivent néanmoins être capables de mettre à jour leur firmware pour la sécurité et les correctifs de fonctionnalités.
La spécification 5G NR se réfère à ces différentes configurations en tant que “parties de bande passante”, et en théorie un dispositif peut supporter plusieurs parties de bande passante simultanément sur le même canal, bien que la première version 5G NR limite les dispositifs à une partie de bande passante à la fois.
La 5G NR repose en outre sur un concept de formation de faisceau beaucoup plus avancé que le LTE. La formation de faisceaux est la manipulation des signaux envoyés et reçus par des antennes complexes pour créer des faisceaux dans l’espace qui concentrent la puissance dans une direction particulière. Le LTE pourrait le faire pour les données ; le 5G NR étend cela aux canaux de contrôle également, tout en augmentant la précision et l’adaptabilité globale pour un fonctionnement dans des conditions différentes.
Dans les bandes hautes, la formation de faisceau sera principalement utilisée pour augmenter la portée par focalisation énergétique, tandis que dans les bandes moyennes et basses en dessous de 6GHz, où l’atténuation est moins problématique, la formation de faisceau sera un élément clé de MIMO, la technique des canaux spatiaux à entrées multiples et sorties multiples qui augmente la bande passante pour plusieurs appareils dans la même zone. Bien qu’elle ne fasse pas partie de la première version, la version 5G NR prendra en charge le MIMO distribué, qui permet à un utilisateur de recevoir différentes parties du même flux de données à partir de plusieurs sites.
Cela touche aux autres grands domaines de la 5G au-delà de la radio : comment les stations de base communiquent entre elles et avec le réseau central, comment les opérateurs gèrent l’ensemble du système en termes de fiabilité et de profit, et quelles formes les nouveaux usages du réseau construits à l’arrière de ces technologies vont prendre. Ne vous attendez pas à ce que le tableau d’ensemble devienne clair avant trois à cinq ans : 5G en 2019 sera autant un travail préparatoire qu’un résultat immédiat.
Article “5G New Radio: The technical background” traduit et adapté par ZDnet.fr
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