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L’ANFR, le « diplomate du spectre », prépare les JO 2024 avec la blockchain


L’ANFR, le « diplomate du spectre », prépare les JO 2024 avec la blockchain

L’ANFR, l’agence nationale des fréquences, est l’autorité indépendante en charge en France de la gestion des fréquences. Yann Maigron, ingénieur télécoms au sein de la direction de la gestion des fréquences, décrit à ce titre l’ANFR comme le « diplomate du spectre ».

Mais l’agence intervient également comme organisateur en matière d’utilisation des fréquences libres. Ces dernières ne sont en effet pas soumises à des autorisations préalables. Les entreprises de l’audiovisuel et de l’évènementiel sont parmi les premiers utilisateurs de ces fréquences pour le fonctionnement de nombreux équipements comme les micros.


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La blockchain, réponse à un contexte d’auto-gestion de fréquences

Problème, ces fréquences souffrent de ce que les économistes qualifient de « tragédie des communs, c’est-à-dire l’utilisation extensive et anarchique d’un bien public au profit d’intérêt particulier. » Ce bien public que sont les fréquences libres étant géré dans un contexte d’auto-gestion, l’ANFR ne peut imposer des règles.

Elle a donc choisi dans ce domaine aussi de jouer le rôle de diplomate ou d’organisateur grâce à une solution basée sur la blockchain. Le cas d’usage porte plus spécifiquement sur les fréquences exploitées par les équipements sans-fil lors d’évènements, notamment sportifs. On en dénombre des milliers chaque année.

« Pour un grand évènement tel que le Tour de France, une étape c’est 900 fréquences audio utilisées au même endroit de manière libre par les professionnels » détaille Cédric Nozet, responsable du développement de l’innovation et du Datalab au sein de l’agence.

Réfléchir à l’utilisation d’une blockchain

Et cette situation occasionne naturellement des brouillages entre les différents professionnels de l’audiovisuel et du spectacle. « Dans un contexte d’auto-gestion, il nous a paru intéressant d’examiner ce que pouvait nous apporter l’utilisation d’une blockchain », afin notamment d’apporter de la transparence aux utilisateurs et de tracer l’utilisation de chaque fréquence.

Le projet est né mi-2017. Et s’il a pu se concrétiser, c’est grâce au financement, à hauteur de 50%, accordé par le secrétariat général pour la modernisation de l’action publique (SGMAP). Le marché public lancé en 2018 avait pour but de déboucher sur un MVP ou produit minimum viable, soit une première version de production.

La startup Blockchain Partner intervient dans le cadre du chantier blockchain initié par l’ANFR. La conception du produit a suivi une méthodologie agile au travers de six cycles de développement entre avril et juillet 2018. Un premier démonstrateur a été finalisé en octobre 2018.

Mais la solution n’a été confrontée aux réalités terrain que cette année entre février et juillet. L’occasion d’ailleurs d’y apporter des évolutions après des tests réalisés lors de grands évènements, dont Vivatech, Roland Garros et le Tour de France.

Blockchain permissionnée ou privée basée sur Ethereum

La première utilisation opérationnelle de la « blockchain des fréquences » a enfin été effectuée en octobre dernier lors d’un rendez-vous hippique majeur, le Prix de l’Arc de Triomphe. De nouveaux essais sont d’ores et déjà prévus en décembre et en 2020 lors des grands évènements pilotés par l’agence, « à la demande de leurs organisateurs. »

Ces différents rendez-vous seront l’occasion d’améliorations sur la base des retours des premiers « vrais utilisateurs ». Concrètement, le produit est basé sur une blockchain privée Ethereum (utilisant un protocole de consensus par preuve d’autorité). Il s’appuie sur une application Web et un wallet installé sur le PC utilisateur.

Et Yann Maigron le concède, cette architecture ne donne pas pleinement satisfaction, en particulier vis-à-vis des utilisateurs, principalement des diffuseurs. « Ils connaissent très peu ce type d’outils numériques. Leur expliquer qu’il faut installer un wallet [Ndlr : MetaMask] sur leur PC, puis transférer ensuite la clé publique sur l’application Web, cela prend un peu de temps. »

Les wallets actuels ne sont « pas suffisamment stables et simples d’utilisation »

D’autant que ces utilisateurs combinent généralement un PC de bureau et un ordinateur portable pour les évènements. Si le téléphone portable simplifierait l’usage, l’ingénieur souligne toutefois que les wallets actuels ne sont « pas suffisamment stables et simples d’utilisation » pour ces terminaux.

Si l’usage est perfectible, les fonctionnalités sont, elles, exploitables. L’application permet ainsi à un organisateur de positionner géographiquement un évènement, puis aux diffuseurs de réserver ou déclarer des utilisations de fréquences de manière transparente pour tous.

Une étape pour préparer la blockchainisation de la gestion du spectre

Sur la blockchain sont donc enregistrés tous les évènements, leur localisation, les fréquences utilisables et enfin chaque déclaration d’utilisation de fréquence. Et cette traçabilité est « importante pour des diffuseurs pour s’assurer lors de grands évènements que leurs concurrents ne bénéficient d’un accès privilégié au spectre » souligne Cédric Nozet.

Mais l’agence considère aussi son application comme un outil de service public à disposition de la communauté des organisateurs pour prévenir les risques de brouillage. L’ANFR espère aussi développer son expertise sur la blockchain dans la perspective de son exploitation pour d’autres cas d’usage, en particulier en lien avec les affectataires de fréquences.

Elle espère en effet convaincre ces grands gestionnaires de fréquences de l’intérêt de cette technologie afin de les encourager à « expérimenter de nouveaux modes de gestion dynamique du spectre. » Le 14 novembre était ainsi organisée une rencontre avec l’un de ces affectataire, le ministère de la Défense.

La blockchain pas efficace pour le Tour de France

Mais l’horizon plus immédiat, c’est l’utilisation de cette première blockchain lors de dizaines d’évènements en 2020. Et l’autorité prévoit dès à présent des évolutions fonctionnelles pour répondre à certaines limites, en particulier en termes de scalabilité. L’appropriation par les utilisateurs demeure également « un défi ».

« La blockchain a un peu plus de difficulté à apporter toute son efficacité sur des évènements comme le Tour de France » en raison d’une utilisation impliquant un grand nombre de sites. Des améliorations s’imposent si, comme le souhaite l’ANFR, la blockchain doit trouver sa place lors des Jeux Olympiques de 2024.

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