Le flou qui entoure la situation de Huawei en France inquiète les opérateurs. Alors que ces derniers se lanceront dans le déploiement de leurs réseaux 5G dans les prochains mois, ils n’ont pas manqué de le faire savoir aux membres du gouvernement présents lors de la cérémonie des vœux de la Fédération française des télécoms, qui regroupe les opérateurs français.
Par la voix d’Arthur Dreyfuss, président de cette organisation – et par ailleurs secrétaire général d’Altice France – ils n’ont ainsi pas manqué de faire pression sur les autorités pour que celles-ci clarifient leur position vis-à-vis de Huawei, une semaine après l’entrée en vigueur de la loi sur la sécurité des réseaux mobiles, également baptisée “loi anti-Huawei”.
« La sécurité nationale et la souveraineté numérique, faut-il le rappeler, ne commencent pas sur le bout de nos antennes radio et ne s’arrêtent pas à la frontière monégasque, suisse ou italienne. Il est urgent pour les opérateurs de sortir rapidement de cette situation de flou, d’incertitudes, de non-dits, de rumeurs sur le choix de nos équipementiers », a ainsi fait savoir Arthur Dreyfuss ce mardi, devant un parterre composé notamment des ministres Agnès Pannier-Runacher et Julien Denormandie ou encore du président de l’Arcep Sébastien Soriano.
publicité
Clarification exigée avant le lancement de l’appel d’offres
Et d’en appeler à ces derniers pour qu’ils sortent du bois avant le lancement de l’appel d’offres pour l’octroi de fréquences 5G, qui se tiendra au printemps sous l’égide du gendarme des télécoms. « Pour pouvoir enchérir sur des blocs de fréquences, nous avons impérativement besoin de savoir, au préalable, ce que seront les coûts de déploiements. Les coûts, ce sont essentiellement deux paramètres : les obligations de déploiements ET les conditions financières dans lesquelles nous nous approvisionnons en équipements pour répondre à nos obligations », a indiqué Arthur Dreyfuss, regrettant que ces conditions soient « aujourd’hui inconnues ».
« Les choix que le Gouvernement fera sur les conditions d’exploitation des équipements 5G pourraient impacter puissamment les coûts de déploiement, mais également remettre à plat les réseaux 3G et 4G. Nous vous demandons donc, solennellement, de surseoir au lancement de l’appel à candidatures pour les fréquences 5G tant que cette situation au sujet des équipementiers, situation impossible, ne sera pas clarifiée », a expliqué celui-ci.
Rappelons que le Parlement a adopté en juillet dernier une loi destinée à sécuriser les réseaux 5G. Celle-ci prévoit un « régime d’autorisation préalable, fondé sur des motifs de défense et sécurité nationale, des équipements de réseaux » pour tous les appareils installés depuis le 1er février 2019 en France. Elle soumet de fait la présence de tel ou tel équipement ou de tel ou tel logiciel sur les réseaux mobile de nouvelle génération à une autorisation préalable délivrée par Matignon dans un délai de deux mois sur la base d’une recommandation de l’ANSSI.
Le cas Huawei pose aussi question chez nos voisins
La situation de Huawei ne fait pas l’objet d’un flou juridique qu’en France. En Espagne, l’opérateur historique espagnol Telefonica, a ainsi choisi de privilégier Huawei pour équiper le cœur de son futur réseau 5G, que ce soit en Espagne ou sur son second marché, le Brésil. Une option également privilégiée par Orange, dont la branche espagnole collabore avec Huawei, ZTE et Ericsson pour le déploiement de son réseau 5G de l’autre côté des Pyrénées.
L’opérateur espagnol, partenaire traditionnel de l’administration espagnol, a toutefois annoncé qu’il déléguerait à un autre fournisseur, qui pourrait être Nokia ou Ericsson, l’édification d’une partie de son cœur de réseau à compter de 2020.
La décision de Telefonica n’est pas sans rappeler celle d’autres opérateurs européens qui ont opté pour plusieurs équipementiers au lieu d’un seul et unique, à l’image de Vodafone outre-Manche. L’opérateur britannique a ainsi débuté en juillet dernier le déploiement de son réseau 5G en ayant recours aux technologies du constructeur chinois sur ses équipements de réseau, en-dehors de son cœur de réseau. En Allemagne, Deutsche Telekom avait également donné ses préférences à cette stratégie, avant de suspendre le choix de ses fournisseurs en attendant la résolution du “cas Huawei” par les autorités allemandes.
Dernier exemple en date en Norvège, où le principal opérateur du pays, Telenor, a également conclu un partenariat avec la société suédoise Ericsson pour le déploiement de son futur réseau 5G, en abandonnant en rase campagne le constructeur chinois Huawei, avec qui il collaborait pourtant depuis une décennie sur ses réseaux 4G-LTE.
Comments