Alors que le coronavirus apparu en Chine a fait 26 morts et contaminé 830 personnes, l’Organisation mondiale de la santé a décidé de ne pas décréter ” d’urgence de santé publique de portée internationale “. On vous explique pourquoi.
L’Organisation mondiale de la Santé a, jeudi 23 janvier, jugé prématuré de considérer l’épidémie de coronavirus apparue en Chine comme une urgence de santé publique de portée internationale. Les raisons sont multiples.
Parce que prendre une telle décision répond à un protocole et des critères précis
Le fait que l’Organisation Mondiale de la Santé décrète une “urgence de santé publique de portée internationale” répond à un protocole et des critères précis. La décision est prise dans le respect du cadre juridique qu’est le “règlement sanitaire international“, un accord datant de 2005 et qui a été ratifié par 196 pays.
Une telle décision doit se faire, précise l’OMS, en réponse à “un événement extraordinaire dont il est déterminé qu’il constitue un risque pour la santé publique dans d’autres États ” lié au ” risque de propagation internationale de maladies ” et qui implique “une action internationale coordonnée”.
Le problème sanitaire posé doit être “grave”, “soudain”, “inhabituel” ou “inattendu”. Il doit “avoir des répercussions pour la santé publique au-delà des frontières nationales de l’État touché” de nature à “exiger une action internationale immédiate”.
Une telle décision est prise en lien avec l’Etat concerné qui fait des observations. Elle est aussi prise en fonction des données scientifiques recueillies, des données concernant l’évolution de l’épidémie, son mode de transmission, sa dangerosité et éventuellement de l’avis d’un Comité d’urgence.
Le Directeur général de l’OMS, seul habilité à prendre une telle décision, a, concernant le coronavirus, estimé qu’il constituait, à ce stade, une urgence sanitaire en Chine mais qu’il n’était pas encore devenu une urgence sanitaire au niveau international.
I am not declaring the new #coronavirus outbreak a public health emergency of international concern today. The Emergency Committee was divided over whether the outbreak represents a PHEIC. This is an emergency in China, but it has not yet become a global health emergency. https://t.co/16knaV4lMZ — Tedros Adhanom Ghebreyesus (@DrTedros) January 23, 2020
Parce que le Comité d’urgence chargé de guider la prise de décision est divisé
Comme l’a publiquement mis en avant le Directeur de I’Organisation mondiale de la Santé, Tedros Adhanom Ghebreyesus, le comité d’urgence mis en place sur le sujet est apparu divisé sur la nécessité de décréter une urgence de santé publique de portée internationale.
Les membres du Comité favorables à une telle mesure ont mis en avant l’évolution de l’épidémie et l’augmentation du nombre de cas ces derniers jours. D’autres ont conclu qu’il était trop tôt pour prendre une telle décision compte tenu d’une part, du faible nombre de cas répertoriés hors de Chine et d’autre part, des décisions prises par la Chine pour empêcher la diffusion du coronavirus, notamment les mesures de confinement prises à Wuhan et dans sa région.
Les experts ont aussi mis en avant le fait qu’il n’y avait, à ce stade, aucune preuve de transmission entre humains en dehors de la Chine et que cette transmission semblait être “limitée à des groupes familiaux et à des travailleurs de la santé“.
“On a quelques informations sur cette épidémie mais pas assez pour comprendre comment ce virus se transmet et quelle va être la gravité de la maladie in fine ” a de son côté précisé à franceinfo Sylvie Briand, directrice du département Pandémies et épidémies à l’OMS. ” Nous n’avons donc pas déclaré une urgence internationale mais cela ne veut pas dire que l’on ne fait rien. Nos Etats membres ont tous été prévenus. Nous avons, à l’OMS, a t-elle ajouté, des systèmes qui permettent d’envoyer très rapidement des recommandations à tous ces pays dans le monde […] On a des réunions très régulières“.
Parce que cette décision est exceptionnelle et peut avoir un impact considérable
Décréter un “état d’urgence de santé publique de portée internationale” est une mesure exceptionnelle qui n’a jusqu’ici été prise que cinq fois: en 2009 pour la grippe H1N1, en 2014 pour la poliomyélite, la même année ainsi qu’à l’été 2019 pour l’épidémie d’Ebola et en 2016 pour le virus Zika.
Une fois cette mesure décrétée, le Comité d’urgence mis en place pour évaluer l’évolution de la situation doit se réunir et émettre des recommandations au moins tous les trois mois. Ces recommandations peuvent concerner l’Etat touché, les autres Etats ou des mesures à prendre par exemple dans les ports, aéroports ou aux postes-frontières.
L’un des principes mis en avant dans le règlement sanitaire international est “d’éviter d’appliquer des restrictions aux voyages et aux échanges qui n’ont pas lieu d’être”, ainsi que l’explique l’Organisation Mondiale de la Santé sur son site internet.
Lors de la conférence de presse organisée le jeudi 23 janvier, les experts de l’OMS ont indiqué que déclarer une “urgence de santé publique de portée internationale” était une “étape importante dans l’histoire d’une épidémie” et que la ” perception d’une telle décision ” à l’échelle internationale faisait partie des éléments à prendre en compte.A lire aussi Sujets associés
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