Orange se heurte au régulateur belge outre-Quiévrain. Alors que la branche belge de l’opérateur historique a conclu, en novembre dernier, un accord de partage de réseau d’accès mobile avec son concurrent Proximus, celui-ci vient d’être suspendu par l’Autorité belge de la concurrence, saisie par le troisième opérateur mobile du marché belge, Telenet. Pour ce dernier, l’accord noué entre Orange Belgique et Proximus aurait pour effet de créer un mastodonte sur le marché belge des télécoms, alors même que les parts de marché d’Orange Belgique et de Proximus étaient estimées à respectivement 24,4 % et 40,9 % en 2017, selon les derniers chiffres rendus publics par le régulateur belge, l’IBPT.
« Telenet comprend ce qui motive les opérateurs mobiles à vouloir partager leur réseau mobile, certes dans les limites de la légalité, mais se pose des questions sérieuses quant à la façon très poussée dont les deux plus grands acteurs mobiles de Belgique (qui possèdent ensemble une part de marché de 75 % et un quasi-monopole dans le segment “business”) veulent collaborer dans le cadre d’une joint-venture », a fait savoir la direction de Telenet – qui détenait 30 % des parts du marché belge en 2017 selon l’IBPT – pour justifier sa démarche.
D’autant qu’un « accord poussé de ce type entre Proximus et Orange Belgique a également pour effet de réduire de trois à deux le nombre d’acteurs détenteurs d’infrastructure mobile », a relevé le troisième acteur du marché au terme d’un argumentaire qui n’a pas laissé insensible le régulateur belge. Et qui pourrait bien intéresser les opérateurs français, alors que des rumeurs – aussitôt démenties par ces derniers – d’un éventuel passage de quatre à trois acteurs reviennent régulièrement sur le devant de la scène.
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Une décision ambivalente
« Compte tenu de leur impact possible sur la concurrence, le collège de la concurrence impose à Orange et à Proximus de suspendre la mise en œuvre de l’accord entre actionnaires et de l’accord de partage RAN conclu entre eux le 22 novembre 2019, à compter de la date de réception de la présente décision et jusqu’au 16 mars 2020 », a expliqué l’Autorité belge de la concurrence en fin de semaine dernière.
La décision adoptée par cette dernière ménage toutefois la chèvre et le chou en permettant à Orange Belgique et Proximus de continuer leurs travaux préparatoires en vue de la mise en place de leur future joint-venture. Soulignons en effet que la décision du régulateur belge « n’empêche pas l’envoi de RFP (Request for Proposal) pour l’acquisition d’équipements de réseau et la sélection des employés à transférer, si cela ne conduit pas à la conclusion d’accords contraignants », comme l’a fait savoir ce dernier.
Orange Belgique et Proximus ont tenu à défendre l’accord de joint-venture finalisé en novembre dernier. « L’accord sur le partage du réseau mobile d’accès aura des effets positifs pour les clients et pour la société belge dans son ensemble, en particulier un déploiement plus rapide et plus étendu de la 5G, une réduction significative de la consommation énergétique globale et une amélioration totale de l’expérience mobile, tout en maintenant une solide différenciation entre les parties au niveau des services et de l’expérience client », ont en effet déclaré les deux opérateurs, tout en prenant acte de la décision du régulateur belge.
Un marché dominé par Proximus
Pour rappel, l’accord annoncé en juillet dernier entre Orange Belgique et Proximus a pour but de créer une joint-venture détenue à part égale entre les deux opérateurs. Objectif déclaré ? Mettre en commun les réseaux d’accès mobile des deux opérateurs afin « de réaliser des gains d’efficacité opérationnelle en termes de coûts » mais également d’améliorer la couverture du nouveau réseau, « le nombre consolidé de sites mobiles étant estimé supérieur d’environ 20 % au réseau d’accès radio actuel de chaque opérateur pris séparément ».
« Bien que partageant leurs réseaux d’accès mobile, les deux entreprises conserveront le plein contrôle de leurs propres ressources de spectre et continueront à exploiter en toute indépendance leurs cœurs de réseaux afin de garantir une expérience client et de service différenciée », avaient toutefois déclaré les deux entreprises lors de l’annonce de cet accord.
Le marché belge des télécommunications mobile est actuellement animé par trois opérateurs principaux (sans compter différents MVNO) : Proximus, qui détenait 44 % des parts de ce marché en 2017 selon les derniers chiffres rendus publics par les autorités belges, suivi d’Orange Belgique (27 %) et de Telenet, avec une part de marché comprise entre 20 et 30 %.
Depuis plusieurs mois, différentes rumeurs font état de l’entrée sur le marché belge d’un quatrième opérateur qui pourrait permettre d’introduire plus de concurrence sur un marché caractérisé par son faible nombre d’acteurs et des prix, certes en baisse, mais toujours relativement élevés par rapport aux pays limitrophes. Dans une étude d’impact publiée en juin 2018, le régulateur belge s’était lui-même montré favorable à l’entrée d’un quatrième opérateur mobile sur le marché, relevant que cette concurrence nouvelle permettrait de faire baisser les prix et d’améliorer l’innovation, au risque toutefois d’une baisse des investissements consentis, notamment en zone rurale.
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