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Pourquoi le plan européen de cloud computing ne fera fait pas peur aux géants américains

Pourquoi le plan européen de cloud computing ne fera fait pas peur aux géants américains

AWS, Microsoft Azure et Google Cloud représentent ensemble plus de la moitié du marché mondial de l’infrastructure de cloud public. Mais il faut plus que cela pour empêcher le ministre français des finances Bruno Le Maire et son homologue allemand Peter Altmaier de planifier une riposte européenne sous la forme d’une infrastructure informatique européenne.

Les deux dirigeants ont annoncé qu’ils vont organiser des ateliers à la fin du mois afin de de formuler des propositions pour développer un secteur européen du cloud computing sûr, qu’ils présenteront dès l’année prochaine.

Dassault Systèmes et OVHcloud montent au créneau

“Nous voulons établir une infrastructure de données européenne sûre et souveraine, y compris des entrepôts de données (data wharehouse), la mise en commun des données et le développement de l’interopérabilité des données” a-t-il ajouté.

Cette annonce fait suite à un appel lancé par le ministre au début du mois avec l’éditeur français Dassault Systèmes et la société de cloud computing OVHcloud, qui se sont vu confier l’ambitieuse mission d’élaborer un plan pour briser la domination des entreprises américaines dans le cloud computing.

Il ne s’agit pas que de la France : la volonté de s’affranchir de la domination technologique américaine est désormais inscrite dans les textes au niveau européen.

Que change le cloud act ?

Ursula von der Leyen, par exemple, qui a récemment pris la présidence de la Commission européenne, a déclaré dans son agenda pour l’Europe que s’il est peut-être trop tard pour produire des “hyperscalers”, il est encore temps d’atteindre la “souveraineté technologique” dans certains domaines clés.

Et il y a quelques semaines, l’ancien chef du MI6, John Sawyers, a averti que l’échec de l’Europe à être compétitive sur le plan technologique signifie que le continent deviendra de plus en plus dépendant des autres pays – “surtout des Etats-Unis, à un moment où les Etats-Unis sont moins attentifs aux intérêts de leurs alliés” a-t-il déclaré.

L’une des principales sources de préoccupation est la Clarifying Lawful Overseas Use of Data Act (CLOUD) signée l’année dernière, en vertu de laquelle les autorités américaines peuvent exiger que leurs fournisseurs de stockage nationaux leur donnent accès aux informations détenues sur leurs serveurs, même si ces données sont situées à l’étranger.

Reconquérir la souveraineté numérique du continent

En Allemagne, où la police fédérale est équipée d’appareils d’enregistrement Motorola qui téléchargent des données directement sur AWS (appartenant à Amazon), la loi CLOUD a été accueillie avec méfiance.

Le commissaire allemand chargé de la protection des données et de la liberté d’information, Ulrich Kelber, avait à l’époque mis en garde contre l’utilisation des services AWS, faisant valoir que les données sensibles devraient être protégées par les lois nationales sur les données plutôt que soumises à la réglementation américaine.

Dans ce contexte, il est facile de voir comment une infrastructure de cloud à l’échelle européenne pourrait apporter une solution à ces problèmes et une manière de reconquérir la souveraineté numérique du continent.

Le gouvernement investira-t-il de l’argent pour le financer ?

La récente déclaration de Bruno Le Maire et Peter Altmaier est pleine de perspectives séduisantes – mais pour Alistair Edwards, analyste en chef de la société technologique Canalys, il est difficile de trouver quoi que ce soit de pertinent dans ce projet.

“Cela ressemble davantage à une déclaration d’intention, mais ce à quoi elle ressemblera n’est pas encore très clair. Qui sera le fournisseur de ce projet ? Le gouvernement investira-t-il de l’argent pour le financer ? Une nouvelle organisation sera-t-elle créée pour la soutenir ?” dit-il à ZDNet. “Ça ressemble plus à un rêve chimérique, et quelque chose qui a peu de chance de gagner en traction.”

Ce n’est pas la première fois que les pays européens tentent d’affronter les géants américains qui fournissent actuellement des services cloud pour la grande majorité du continent. Mais jusqu’à présent, ces tentatives ont eu des résultats très limités.

Le dur exemple de Numergy et Cloudwatt

Le gouvernement français, par exemple, a alloué 101 millions de dollars à la création de deux fournisseurs en 2012 : Numergy et Cloudwatt. Sept ans plus tard, le premier a été absorbé par SFR faute de clients, et le second devrait être fermé l’été prochain.

Alistair Edwards explique que cela reflète un manque de demande pour une organisation européenne de cloud computing. “La plupart des clients ne sont pas si politiquement motivés, dit-il, et il y a une volonté générale d’ignorer le fait que les hyperscalers sont sous contrôle américain. La plupart des entreprises confient leurs données à Microsoft, AWS et Google Cloud.”

C’est ce qui ressort du taux de croissance des “trois grands” : au cours de l’année écoulée, AWS a progressé de 35 %, Microsoft Azure de 59 % et Google Cloud a été le leader en terme de croissance avec 69 %.

“Principalement une décision politique”

Pour Edwards, cette annonce est donc “principalement une décision politique” et non une décision soutenue par une demande suffisante pour faire du futur cloud européen une alternative sérieuse à AWS, Microsoft ou Google Cloud au cours des prochaines années.

En termes simples, il n’y a pas assez de crainte que l’administration américaine puisse ou veuille accéder aux données des clients pour susciter un réel désir d’envisager d’autres options de fourniture dans le Cloud.

De plus, rien ne garantit que les clients seront plus disposés à confier leurs données à un gouvernement plutôt qu’à un fournisseur traditionnel issu du secteur privé.

“La confiance est dictée par la stabilité”

“La confiance est dictée par la protection des données, mais elle est aussi dictée par la stabilité” explique M. Edwards. “Lorsqu’un client décide de l’emplacement de ses données, il doit s’assurer que le support de son fournisseur ne disparaîtra pas soudainement. Mais les gouvernements et leurs politiques changent tous les deux ou trois ans “.

Pour être efficace, a-t-il poursuivi, l’initiative serait plus avantageuse si elle était indépendante des gouvernements. “Ou vous prenez le risque que votre fournisseur public soit potentiellement acquis par, disons, AWS après les prochaines élections” dit il en riant.

Microsoft et AWS ont déjà réagi à l’annonce des ministres français et allemand ; tous deux ont souligné qu’un cloud en Europe n’aura pas l’envergure nécessaire pour être compétitif sur le marché actuel.

Et M. Edwards a confirmé qu’il est peu probable que la nouvelle suscite beaucoup d’angoisse chez les géants américains de la technologie. “Ils ne verront probablement pas cela comme une menace sérieuse, a-t-il dit. La souveraineté en matière de données, du moins semble-t-il, est encore loin d’être acquise pour l’Europe.

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